Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/267

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propriétaires, me semble un joli préambule de la Terreur.

Quelqu’un vivant en contact avec les gouvernants de l’heure présente, et que je rencontre, me dit négligemment : « Il se pourrait bien que, cette nuit, on fusillât l’archevêque ! »

Samedi 10 avril. — Chez Voisin, je demande le plat du jour : « Il n’y en a pas, il n’y a plus personne à Paris, » me répond-on. Il ne dîne aujourd’hui qu’une vieille habituée, que j’y ai vue, pendant tout le temps du siège.

En sortant de là, je suis frappé du peu de monde qu’on rencontre. Paris a l’air d’une ville où il y a la peste. Il n’y a vraiment plus de matière masculine pour faire des groupes, et les quelques figures de jeunes gens qu’on rencontre, appartiennent à des étrangers.

Le seul mouvement, la seule vie de Paris : ce sont de petits déménagements, entre chien et loup, sur des voitures à bras, traînées par des gardes nationaux : les locataires démocrates se hâtant de profiter du décret de la Commune sur les loyers.

Pas de groupe sous le lampadaire de l’Opéra, pas de groupe au coin de la rue Drouot, je rencontre seulement quelques gens ramassés à l’entrée de la rue Montmartre.

Une chose curieuse dans les petits rassemblements, je me fourre, on ne cause pas des événements de