Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/370

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lui dis, ce ne l’étonnerait pas… quand nous attaquons un tas, nous croyons notre fortune faite… et ça recommence comme ça, à chaque nouveau tas ! »

Dimanche 9 novembre. — Je trouve, chez Flaubert, Ramelli qu’il veut faire engager par l’Odéon pour la pièce de Bouilhet. Elle est là, se plaignant, avec des éclats de voix, du théâtre qui a pris l’habitude de ne plus payer que les premiers rôles, du théâtre qui donnait à Berton 300 francs par soirée dans Le Marquis de Villemer… Je n’ai pas vu de corps d’état où la revendication de l’argent se fasse avec plus de violence que chez les acteurs et les actrices. Dans les lamentations de Ramelli, il y a de la colère sanguine avec des feux au visage, qui forcent l’actrice à se tenir dans une pièce où il n’y a pas de cheminée allumée, et d’où nous parviennent, par la porte ouverte, ses doléances furibondes.

Enfin elle part, et nous voilà seuls. Flaubert me conte l’inespérée fortune de la Présidente (Mme Sabatier, la femme au petit chien dont Ricard a fait un si beau portrait) qui a reçu un titre de 50 000 livres de rente, deux jours avant l’investissement de Paris, un envoi de Richard Wallace, qui avait couché avec elle dans le passé, et lui avait dit : « Tu verras, si je deviens jamais riche, je penserai à toi ! »

Flaubert me parle encore de cette ambassade chinoise, tombée au milieu de notre siège et de notre