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J’ai acheté des albums anciens, un bronze si gras qu’il semble la cire de ce bronze, et la robe d’un tragédien japonais, où sur du velours noir, des dragons d’or aux yeux d’émail, se griffent au milieu d’un champ de pivoines roses.

Dimanche 1er novembre. — Paris. Une lettre de Zola me convie, aujourd’hui, à aller voir la répétition de sa pièce (les héritiers rabourdin).

Cluny : une salle de spectacle qui, en plein Paris, trouve le moyen de ressembler à une salle de province, comme peut-être, par exemple, la salle de Sarreguemines. C’est navrant, pour un homme de valeur, d’être interprété dans une telle salle. Et je ne pense pas sans tristesse à Flaubert, dont le tour va venir dans un mois.

Au fond, une répétition a toujours de l’intérêt pour moi. C’est le seul milieu, où un semblant de fantastique se mêle à la vie réelle. Et je regardais dans cette lumière indescriptible, dans cette lumière faite de la clarté mourante d’un crépuscule et du flambement flave du gaz, mal allumé, je regardais la petite Charlotte Bernard, passer des coulisses sur la scène, avec sur sa peau des colorations et des glacis d’une créature de clair de lune.

Lundi 2 novembre. — Au milieu de la matériali-