Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/225

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Zola et moi, nous nous entretenions de l’état de notre pauvre ami, qui, — il vient de l’avouer, — à la suite de noires mélancolies, se laisse aller à des accès de larmes. Et tout en causant des raisons littéraires, qui sont la cause de cet état, et qui nous tuent les uns après les autres, nous nous étonnions du manque de rayonnement autour de cet homme célèbre.

Il est célèbre, et il a du talent, et il est très bon garçon, et il est très accueillant. Pourquoi donc, presque, à l’exception de Tourguéneff, de Daudet, de Zola, et de moi, à ses dimanches ouverts à tout le monde, n’y a-t-il personne ? Pourquoi ?

Mercredi 21 avril. — Dans nos dîners du mercredi, chez la princesse, maintenant des peintres bouchent les vides des morts, des nombreux morts de l’ancien dîner, uniquement composé d’hommes de lettres.

Gérome qui dîne avec nous, à la veille d’un départ pour Constantinople, me plaît, lui, avec son physique énergique, sa figure cabossée, son regard au grand blanc, enfin par toute cette physionomie, qu’on dirait la physionomie d’un talent farouche.

Il va faire un séjour à Stamboul, chez le peintre de Sa Hautesse, qui exerce sa profession au milieu des scènes les plus bouffonnes : « Un nez, des yeux, une bouche, deux moustaches, tu vois, c’est le sultan, qui désignant chaque morceau de sa figure avec