Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/129

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contre l’esprit duquel, le mien aimait à battre le briquet.

Samedi 27 mars. — Dîner chez Zola. En prenant le café, Zola et Daudet causent des misères de leurs jeunesses. Zola évoque le temps, où très souvent, il avait son pantalon et son paletot au Mont-de-Piété, et où il vivait dans son intérieur en chemise : la maîtresse avec laquelle il vivait alors, appelait ces jour-là, les jours où il se mettait en Arabe.

Et il s’apercevait à peine de la panne, dans laquelle il vivait, la cervelle, prise par un immense poème, en trois parties : « La Genèse, l’Humanité, l’Avenir », et qui était l’histoire cyclique et épique de notre planète, avant l’apparition d’une humanité, pendant ses longs siècles d’existence, et après sa disparition. Jamais il n’avait été plus heureux que dans ce temps, tout misérable qu’il était… D’abord, reprend-il, il n’avait pas un moment douté de son succès futur, non qu’il eût une idée bien définie de ce qui lui arriverait, mais il était convaincu qu’il réussirait, ajoutant que c’était assez difficile à exprimer ce sentiment de confiance, que par pudeur vis-à-vis de nous, il définit ainsi « que s’il n’avait pas foi dans son œuvre, il avait confiance dans son effort ».

Puis il parle d’un logement glacial, d’une espèce de lanterne qu’il avait, un certain nombre d’années, occupée au septième, et de ses montées sur un