Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/234

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demande alors que quelqu’un veuille bien, en le payant, me ramener à la fête, dont je sors. Un petit bossu, se met à marcher devant, un bossu effrayant, dont la bosse mouvante se déplaçait, et allait d’une épaule à l’autre, à chacun de ses pas. Enfin, me voilà revenu à ma fête, éclairée à giorno… Mais non, ce ne sont plus les gens du casino de la journée, ce n’est plus le même monde. Partout des figures hostiles, des yeux me regardant de travers, des bouches chuchotant des choses méchantes… Oh, mais voici un de mes amis les plus intimes, qui se trouve là, par un hasard inexplicable, et auquel je demande à me reconduire… Et ne voilà-t-il pas que, sans me regarder, sans m’écouter, sans me répondre, il prend la taille d’une femme, se met à valser, et la salle s’agrandissant à chacun de ses tours de valse, il disparaît à la fin dans l’éloignement de la salle, devenue une salle à perte de vue, et où tout le monde a disparu à sa suite, et où dans l’effrayant vide, les lampes s’éteignent l’une après l’autre. Je me réveille dans une terreur indicible.

Vendredi 4 mai. — L’attente tous les jours, dans l’état de souffrance où je suis, et avec les quatre soupes au lait, que j’ai dans le ventre, depuis lundi, l’attente d’une lettre indignée ou injurieuse, à propos de tel ou tel paragraphe de mon Journal.