Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/85

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xviiie siècle, ces bourdaloues de Sèvres, ces bourdaloues de Saxe, à la forme de ce coquillage nacelle, qu’on appelle nautile, commençant dans les volutes d’un colimaçon, refermant leurs bords avec un élégant gondolage, et finissant en un bec comme émoussé. Oh ! les beaux, oh ! les royaux bourdaloues de Sèvres, en bleu lapis, autour d’un médaillon représentant une scène de Watteau, dans un encadrement de feuillage d’or, aux puissants reliefs de l’or de Vincennes. Mais plus familiers, plus humains, ces bourdaloues de Saxe, à l’anse faite d’un tortil de ronce, enguirlandée de trois ou quatre fleurettes, et où la blancheur de la porcelaine est semée de petits bouquets : bourdaloues d’une forme plus contournée, plus serpentante, plus amoureuse des parties secrètes de la femme.

Dimanche 4 septembre. — Jean Lorrain vient déjeuner, ce matin, à la maison ; et confiant en moi, il se répand sur sa jeunesse. Tout gamin, il s’était pris d’une passionnette pour la fille de Gautier, pour Judith Mendès, qui venait aux bains de mer de Fécamp, et comme elle peignait alors, il lui portait son chevalet, lui rendant mille petits services. En récompense, à lui qui ne connaissait et n’aimait que Musset, Judith faisait lire du Victor Hugo et du Leconte de Lisle.

Or, en ces années, le jeune Jean Lorrain avait