Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/103

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et que les convives se passaient l’un à l’autre ; au travers des plats, le vieux livre de la maison, où le cuisinier écrivait, depuis des générations, tous les jours, le menu du déjeuner et du dîner, et où les blancs étaient couverts de notes, de dates, d’événements de famille, de pensées auxquels la gaieté des hôtes de passage ajoutait des réflexions, des caricatures, des dessins : la table était cela, avec la voix de la princesse, un chant, sa parole, un rire. Sensible comme une Italienne à la beauté du fils de madame Gervaisais, elle le plaçait toujours à côté d’elle, sans souci des grandes personnes. Le mutisme de l’enfant lui était égal : elle s’amusait à le voir.

Après le dîner, la princesse se tenait dans une petite galerie aux pilastres plaqués de morceaux de glace, feuillagés d’acanthe, aux portes bleues à filets dorés, au petit pavé caillouté de violet et de jaune ; une fraîche pièce qui respirait par deux fenêtres ouvertes, et laissait voir le dôme de rosiers en arbres épanouissant leurs bouquets de roses énormes. Là, joli-