Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de victoire, puis elle suivit au dehors le peuple qui se poussait pour sortir.

Elle était sur la place : elle avait devant elle des marches noires de monde ; sur les grands escaliers montants, des hommes, des femmes, des pèlerins à coquilles, des touristes à lorgnette, des pâtres de la Sabine ; sous les pieds de la multitude, des mères, çà et là, allaitant leurs enfants de leur sein nu ; les gens du Borgo, du Transtevere, dei Monti, tassés autour de l’obélisque, grimpés sur les barres de fer qui relient ses bornes, sur son soubassement, sur son piédestal, lui faisant un socle de la misère en grappe des quartiers pauvres ; passant là dedans, le mosciarrellajo, le marchand de marrons et de lupins qu’il débite avec un petit cornet en laiton ; sur les côtés de la place trop étroite, un encombrement de centaines de voitures de gala, des carrosses aux roues rouges, aux galeries d’or, aux caisses dorées, aux chevaux in fiocchi, enrubannés, empanachés, une armée de valets, de laquais, de cochers, de majordomes, extravagamment parés de