Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/134

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elle se revit à ses dix-huit ans, dans la miniature de Mme de Mirbel.

Et comme si, devant son âme et ses yeux, se levaient à l’instant de la légère aquarelle, du nuage de sa couleur sur l’ivoire, la sensation émue et la présence visible d’un temps oublié, sa personne d’alors lui réapparut. Elle était coiffée avec ces cheveux s’élevant au-dessus de la tête en un gros papillon, la coiffure qui donnait le piquant d’une physionomie exotique aux Parisiennes des premières années du règne de Louis-Philippe. Des fleurs de Fombonne, une bruyère blanche et des roses de haie, étaient jetées à travers ses boucles. Elle avait une robe de tulle illusion à mailles sur satin blanc, avec la ceinture de bleu Mademoiselle, à la mode de cet hiver-là, l’hiver de 1836. C’était pour un bal chez M. Laffitte ; et son père, ce soir-là, l’avait trouvée si charmante, qu’il avait voulu garder d’elle une image qui la lui montrât toujours ainsi. Toute la petite histoire de ce portrait, elle se la rappelait ; le bal, elle le revoyait, revoyait la tenture