Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/145

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deux à deux, marchaient, se tenant par un doigt de la main, avec un sourire qui faisait vivre un moment leur teint de cire, et mourait aussitôt. Et sous la tombée d’aplomb du soleil, la petite fontaine au milieu de la place disparaissait sous la décoration humaine, l’ornement sévère, la grandeur de repos d’un groupe assis de contadines accoudées, appuyées, dans une pose de rêverie souveraine qu’eût dessinée Michel-Ange, avec l’ombre de leur visage qui paraissait de bronze, entre l’éblouissement blanc de leur panno et de leur fichu.

Mme Gervaisais prenait là des croquis. Elle faisait même venir une de ces femmes chez elle. Et sans souci des défenses des médecins, elle commençait à en faire une étude à l’huile. Mais son esquisse n’était pas encore couverte qu’elle renvoya la paysanne, fit jeter dans un coin sa boîte et ses couleurs, surprise de se reconnaître si vite guérie d’un caprice où elle avait espéré trouver là pâture d’une passion.


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