Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/325

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leurs costumes, les pieds sur la grande frise qui déroule de chaque côté de l’Agneau céleste le troupeau fantastique des brebis marchant sur un fond noir.

Elle était seule dans l’église fermée à cette heure.

Elle commençait à prier, à prier sur ses genoux, sur ses genoux écorchés. Et son adoration se mêlant d’un peu d’épouvante, ses yeux se perdaient dans la vision du plafond, sur ces images divines, si différentes de toutes les autres, attirantes et douces, auxquelles les livres et les gravures l’avaient habituée ; elle s’égarait dans ce rêve dur du ciel, dans ce paradis formidable, ce hiératisme barbare, cette beauté cherchée dans l’antihumain, ce style de l’inexorable qu’ont ces figures, cet effroi du Christ pareil à un terrible Empereur de la souffrance ; et peu à peu, enlevée au sentiment de la réalité, sa vue troublée, entrant en union avec ce qui brillait au-dessus d’elle dans l’or, elle croyait assister à un miracle de la lumière de quatre heures, frappant la mosaïque, les corps, les faces, les vêtements,