Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/336

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même à la sainteté des plus grands Saints, l’instant où l’âme doit continuer à aimer, toute vide et tout abandonnée qu’elle soit de l’amour divin, malgré la perte de tous les dons d’effusion, d’espérance et de confiance. La « Grâce », elle avait perdu la Grâce, et elle éprouvait une consternation de ce délaissement qui la rendait à sa propre indigence. Tous les exercices étaient maintenant pour elle sans saveur et sans suavité. Vainement elle prenait demeure dans les plaies saignantes de Jésus-Christ, se réfugiait dans sa Passion ; vainement elle redoublait d’appels, d’évocations et de supplications : elle ne parvenait plus à s’attendrir, se fondre, se mouiller de la componction de ses larmes passées. Ses oraisons lui laissaient la froideur d’une statue ; et ne pouvant que regarder les murs, elle ne se voyait plus capable de faire jaillir un acte d’amour de la dureté de son cœur.


XCVI