Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/350

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quand elle sortait, laissait tomber par habitude, le matin et le soir, sur son front, la froideur de sa bouche. Le petit être se sentait oublié de ses pensées, de ses yeux, de ses regards ; il souffrait de la privation de ces doux petits mots inutiles dont elle ne le gâtait plus, de ces silences de caresse avec lesquels, autrefois, elle semblait lui dire, les lèvres fermées : « Je t’aime ! » Avec lui, elle n’avait plus sa voix de petite mère, et elle ne lui donnait plus rien de cette tiédeur d’amour, l’air vital de son petit cœur.

Au souffle de toutes les idées, versées en elle, sur l’indignité des affections charnelles et imparfaites pour la créature périssable et créée sur le sacrifice généreux qu’on en doit faire au Créateur, cette froideur de Mme Gervaisais grandissait péniblement, au milieu de tourments, de rechutes, de retours qui la rejetaient à son enfant, la traversaient d’envies soudaines de l’étreindre, d’élans dont elle se sauvait en fuyant brusquement dans sa chambre, où elle fondait en larmes, se grondant de ses faiblesses, et