Page:Goncourt - Quelques créatures de ce temps, 1878.djvu/225

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

près de Saverne. Je finissais mes études, et je logeais chez un curé. Le presbytère était sur le haut d'une colline. Du bas du presbytère partait une grande allée de vieux tilleuls,--comme vos tilleuls là-bas, madame,--qui menait au cimetière. Les gens du pays racontent toutes sortes d'histoires sur cette allée de tilleuls. Il paraît qu'il s'y pend au même arbre un homme tous les ans. Ce que je puis dire, c'est que j'y suis resté un an, et que j'ai vu au fameux arbre un pendu. Mes deux fenêtres donnaient du côté de l'allée, et quand il faisait une belle lune, je distinguais chaque tombe du cimetière. Une nuit...

--Ah! monsieur Frantz,--dit madame *** en se cachant de pâlir sous un sourire,--vous avez fait le pari de me faire peur ce soir, et voyez, vous avez gagné. Qui de vous, messieurs, me donne le bras jusqu'au château?

--Moi, madame, si vous le voulez bien,--dit Hector en se levant.

Les jeunes gens allumèrent un cigare. On retrouva du thé au fond de la théière.

--L'apparition de Saverne, l'apparition de