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OBLOMOFF.


VII


Zakhare avait passé la cinquantaine. Il n’était déjà plus le descendant direct des Calebs russes, chevaliers de l’antichambre, sans peur et sans reproches, dévoués à leurs maîtres jusqu’à l’abnégation, qui se distinguaient par toutes les vertus et n’avaient aucun vice. Zakhare était un chevalier de peur et de reproche.

Il appartenait à deux époques, et toutes les deux avaient posé sur lui leur cachet. De l’une il avait hérité un dévouement sans bornes pour la maison des Oblomoff, de l’autre, plus récente, le raffinement et la corruption des mœurs.

Passionnément dévoué au barine, il passait rarement un jour sans lui faire un mensonge. Le serviteur du bon vieux temps arrêtait parfois le barine dans ses dissipations et dans ses excès ; Zakhare aimait à s’enivrer à ses dépens avec ses amis ; le serviteur d’autrefois était chaste comme un eunuque ; celui-ci était toujours fourré chez sa soi-disant commère, car cette parenté spirituelle était bien équivoque.

Le premier gardait plus fidèlement qu’un coffre-fort l’argent du maître, Zakhare épiait l’occasion de faire des additions fausses pour les dépenses journa-