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OBLOMOFF.

Si la pluie tombe, quelle généreuse pluie d’été ! Elle jaillit avec impétuosité, en abondance ; elle saute avec vigueur, tout comme les grosses larmes d’un homme saisi d’une joie subite. Dès qu’elle a cessé, le soleil vient de nouveau regarder avec un sourire d’amour et sécher les champs et les collines, et de nouveau toute la contrée répond au soleil par un sourire de bonheur.

Le villageois salue joyeusement la pluie. « La chère pluie mouillera, le cher soleil séchera ! » dit-il, en exposant avec volupté la face, les épaules et le dos à la tiède averse. Là-bas les orages ne sont pas terribles, mais bienfaisants : ils arrivent toujours à la même époque, n’oubliant presque jamais la Saint-Élie, pour ne pas faire mentir la tradition populaire[1].

Il paraît même que, chaque année, les coups de tonnerre sont égaux en nombre et en force, tout à fait comme si le gouvernement céleste dispensait pour la saison à toute la contrée sa mesure habituelle d’électricité. Là, on n’entend parler ni d’ouragans ni de désastres.

Jamais personne n’a eu occasion de lire dans les gazettes quelque chose de pareil sur ce petit coin

  1. Quand il tonne le jour de saint Élie, on dit communément que le prophète passe les ponts pour aller au ciel : c’est un signe que l’année sera bonne.