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OBLOMOFF.

maison, mais qu’on achetait, les Oblomoftzi montraient une avarice extrême. Ils plumaient bravement une excellente dinde ou une douzaine de poulets pour l’arrivée d’un hôte, mais ne mettaient point dans un plat un raisin de Corinthe en trop, et pâlissaient si le convive prenait la liberté de se verser lui-même un verre de vin.

Au reste une pareille débauche n’arrivait presque jamais : quelque cerveau brûlé, un homme perdu dans l’opinion publique en eut seul été capable : mais on n’aurait pas laissé un semblable monsieur approcher de la cour. Non, telles n’étaient pas les mœurs du pays.

À moins qu’on ne lui réitère l’invitation jusqu’à trois fois, le convive ne touche à rien. Il sait très-bien qu’une offre qui n’est pas répétée contient en soi la prière de refuser.

Et on n’allumait pas deux chandelles pour tout le monde : la chandelle était achetée en ville, au comptant, et la maîtresse, de la maison la gardait elle-même sous clef, comme toutes les choses achetées. Les bouts de chandelle étaient comptés et serrés avec soin.

Généralement on n’aimait point à débourser de l’argent. Quelque indispensable que fût un objet, on ne se mettait en frais pour l’avoir qu’à grand’peine et seulement quand la dépense était minime. Une dé-