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dans celle du moyen âge. L’auteur s’est montré purement et simplement un éducateur, mais non pas un styliste.

Dans ce cas, dira-t-on, pourquoi ne pas s’en tenir à une édition du poème ? La réponse est facile : la supériorité littéraire de la rédaction en vers est plus que compensée par l’importance historique de la version en prose ; car c’est par celle-ci que nous nous trouvons rattachés directement à une des époques les plus intéressantes de la littérature anglaise : l’époque de Caxton et de l’introduction de l’imprimerie.

La version anglaise. — En 1480 Caxton traduisit l’Image du Monde en anglais, et l’imprima à Westminster en y ajoutant des gravures sur bois, chose inconnue en Angleterre jusqu’alors.

Grâce à de fréquents séjours à Bruges, le célèbre imprimeur avait acquis une connaissance parfaite de la langue française. Son choix de l’Image prouve l’importance de notre encyclopédie, même à cette époque. Cet ouvrage obtint en Angleterre autant de succès qu’en France. Caxton lui-même en a publié deux éditions[1]. Un certain Lawrence Andrewe en fit paraître une troisième à Londres en 1527.

Imprimés français. — La rédaction française en prose a aussi été imprimée deux fois à Paris : par Michel le Noir en 1501, et par Alain Lotrian en 1520. Toutes ces éditions sont rares et ont une grande valeur[2].

Traductions hébraïques. — Outre la traduction en anglais, on connaît une version de l’Image en judéo-allemand, et deux en hébreu qui diffèrent sous certains rapports.

Neubauer[3] suppose que la traduction hébraïque a été faite en 1273 à Malines par un Juif, Hagins, qui est peut-être le même que Haginus Deulecret, grand-rabbin de Londres, où les Juifs français étaient nombreux.

Plagiat. — À titre de curiosité, mentionnons aussi le Mirouer du

  1. Ces éditions ne sont pas datées, mais, d’après certains signes extérieurs et la comparaison avec d’autres imprimés de Caxton, on fixe généralement la date de la première édition à 1481, et de la seconde à 1490.

    Les exemplaires connus du Mirrour of the World (c’est ainsi que Caxton intitule sa traduction) sont assez nombreux. Seymour de Ricci, dans son ouvrage si complet sur les incunables de Caxton (A Census of Caxtons. Printed for the Bibliographical Society at the Oxford University Press. 1909), mentionne 33 exemplaires de la première édition, et 19 de la seconde.

    La Early English Text Society de Londres a sous presse une reproduction annotée de l’édition de 1481, contenant les gravures sur bois de Caxton en fac-simile.

    Cf. le chapitre sur la filiation des manuscrits, p. 18 s.

  2. E.-D. Grand (o. c. Positions de thèses 1885) mentionne un exemplaire à Paris (Bibl. Nat. impr. D. 3782. Rés.) et un à Oxford (Bodl. Douce. M. M. 483). Il faut ajouter à cette liste : British Museum 568. e. 16 (éd. de 1520), et 697. D. 22 (éd. de 1501).
  3. V. A. Neubauer, dans Romania t. V (an 1876) p. 129-139, et dans l’Histoire Littéraire, t. XXVII p. 500 s. ; cf. p. 8.