Page:Gourmont - La Culture des idées, 1900, 2e éd.djvu/87

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troupeau, juge vaine, surannée ou tyrannique.

On trouverait une assez curieuse illustration de ces principes en examinant l’état présent de la morale sexuelle. Cette morale, particulière aux peuples chrétiens, est fondée sur l’association très étroite de deux idées, l’idée de plaisir charnel et l’idée de génération. Quiconque, homme ou peuple, n’a pas dissocié ces deux idées n’a pas rendu la liberté dans son esprit aux éléments de cette vérité ; qu’en dehors de l’acte proprement générateur accompli sous la protection des lois religieuses ou civiles (les secondes ne sont que la parodie des premières, dans nos civilisations essentiellement chrétiennes), les relations sexuelles sont des péchés, des erreurs, des fautes, des défaillances ; quiconque adopte en sa conscience cette règle, sanctionnée par les codes, appartient évidemment à une civilisation encore rudimentaire. La plus haute civilisation étant celle où l’individu est le plus libre, le plus dégagé d’obligations, cette proposition ne serait contestable que si on la prenait pour une provocation au libertinage ou pour une dépréciation de l’ascétisme. Morale ou immorale, cela n’a ici aucune importance, elle devra, si elle est exacte, se lire au premier coup d’œil dans les faits. Rien de plus facile. Un tableau statistique de la natalité européenne mon-