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Geffosses, Dimanche 11 septembre, 4 h.


COUCHÉ dans le sable, dans les dunes, à l’abri du vent. Par une échancrure, je vois la mer glauque sous le ciel, sous le ciel laiteux ; à l’horizon, après une bande sombre, Jersey se détache dans un bleu de brume. Le sable chauffé par une journée de soleil me brûle et m’amollit ; il y a comme des baisers dans l’air, et les vains désirs se fondent en une tristesse. Le halètement sourd du reflux engourdit la pensée, de même que les effluves salines aiguisent les sens. L’hallucination vient : Tu surgirais tout d’un coup d’entre les grandes herbes des dunes que je n’en serais pas étonné. C’est aussi que j’ai beaucoup vécu avec