Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/250

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herbe avait raison. Il faut écrire en français ou en patois : il faut choisir.

C’est ce qu’ont osé faire quelques poètes normands modernes, et leur audace est d’avoir choisi le patois. Il y a, dans l’Anthologie normande, deux merveilleux poètes. L’un écrit en français, et c’est Mme Delarue-Mardrus ; l’autre écrit en patois, et son nom est Louis Beuve.

Puisqu’il s’agit de poètes normands, je dirai un mot de Louis Beuve, car c’est un des seuls qui ose être normand jusqu’au bout, normand de pensée, normand de langage. Il est né en 1865 à Quettreville, près de Coutances, mais d’une famille originaire d’entre Lessay et La Haye-du-Puits, et c’est dans le dialecte encore parlé en cette région qu’il a écrit ses poèmes. Son premier métier fut la librairie, qui est, comme il l’a dit lui-même, « le métier national des Coutançais » ; son second métier fut le journalisme. Il est aujourd’hui rédacteur en chef d’un des journaux les plus répandus de la Basse-Normandie, le Courrier de la Manche. Il demeure à Saint-Lô, à la lisière même du patois dont il a fait un si bel usage. Je ne l’ignore pas tout à fait, ce patois, qui, avec des nuances, est parlé dans tout le nord de la Manche ; M. Louis Beuve