Page:Gourmont - Sixtine, 1923.djvu/248

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C’est un fil de tulle,

C’est un fil de soie : S’en va, comme bulle,

La joie.

Ensuite, il essaya, tout en activant son feu, qu’un humide vent inquiétait, de se réciter le sonnet de son ami Calixte :

Les Désirs, s’envolant sur le dos des Chimères,
Jouent avec la lumière et le crin des orinères…

Mais sa mémoire obstinée ne lui donna que ces deux vers. Il se souvint que Delphin devait le mettre en musique et même sur le thème instrumenter une glose, mais Delphin, faute de convenables intermédiaires entre les cuivres et les cordes, ne composait pas encore : il attendait.

Enfin, se disait Hubert, j’en dois convenir, j’ai failli être heureux. Surprendre une femme, l’hypnotiser avec des baisers, la chloroformer avec des caresses, puis se joindre à elle, au hasard d’un effondrement de coussins, avec, devant les yeux, l’ennui futur du rhabillage partiel, pratiqué en commun, mais dos à dos, on appelle cela être heureux !

Héliot lui avait conté qu’un jour, en pareille fortune, la bonne, au passage le plus intéressant, était discrètement entrée, demandant, par la porte ouverte : « Madame veut-elle ses pantoufles ? »

Donc, j’ai failli être heureux, une fois de plus, car de tels bonheurs ne me sont pas inconnus : il n’y a jamais que la couleur des jarretières qui diffère. Allons, cela sera pour demain ou pour après-demain :