Page:Gourmont - Une nuit au Luxembourg, 1906.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les esclaves romains avaient une vie moins dure que beaucoup de vos ouvriers. Vous faites travailler jusques aux femmes, à la mode sémitique ! Riches et pauvres, d’ailleurs, vous ignorez tous également les joies du loisir. Vous donnez au travail toutes les heures de vos journées, les uns pour avoir du pain, les autres pour conquérir un plaisir dont la fatigue les empêche de jouir, et ceux-ci, les plus fous, pour augmenter leur fortune. Vous en êtes arrivés à ce degré d’imbécillité qui fait regarder le labeur non seulement comme honorable, mais comme sacré, alors que ce n’est qu’une nécessité triste. Cette nécessité, vous l’avez portée au rang des vertus, alors que ce n’est sans doute que le vice d’un être corrompu et pour qui la vie si brève n’est qu’un long ennui.