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BALZAC CHEZ LUI.

— C’était une chanson très-populaire, poursuivit Vidocq, très en vogue alors, très-oubliée aujourd’hui, mais que, pour ma part, je n’oublierai de ma vie. En voici l’air et quelques paroles :


Toi qui connais les hussards de la garde,
Connais-tu pas le trombone du régiment ?
Quel air aimable quand il vous regarde !
Eh bien, ma chère, il était mon amant.


« La voix venait du quai des Orfévres ; elle ne partait pas d’un point plus éloigné que celui où stationnait la voiture de la comtesse. Quelle indigne chance ! murmurai-je, et quelle indigne chanson ! ajouta mon agent en manière de calembour ; il avait, lui aussi, le petit mot pour rire. Mais que faire ? Si je l’avais écouté, il bâillonnait le drôle en grimpant derrière lui à la façon des étrangleurs indiens ; il l’arrachait ensuite de son siége, allait faire semblant de le voler dans un coin, et, pendant ce temps, moi je me débrouillais avec le mort et ces dames. Puis l’agent lâchait mon homme, et mon homme revenait prendre sa place sur son siége, sans se douter du coup de main. Je ne consentis pas à ce plan de campagne. « — Mais qu’allez-vous donc entreprendre ? me demanda mon agent. — Est-ce que je le sais, maintenant que nous