Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/98

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c’est cette autorité que Mme de Mnintonon ne voulut pas lui accorder. En aucun temps, et même alors qu’elle le laissait faire le plus librement à Saint-Cyr, elle ne s’était dépossédée ni de la direction de la maison, ni de la direction de sa propre conscience : « Je ne puis, Madame, disait Fénelon au début de sa lettre, vous parler sur vos défauts que douteusement et presque au hasard : vous n’avez jamais agi de suite avec moi, et je compte pour peu ce que les autres m’ont dit de vous. » Mme de Maintenon voulait un directeur qui l’avertît sans s’imposer. Sa soumission n’allait pas au renoncement ; et se remettre entre les mains de Fénelon, il le lui avait assez fait comprendre, c’était abdiquer. « Fénelon, dit Saint-Simon, s’était accoutumé à une domination qui, dans sa douceur, ne souffrait point de résistance… Il voulait être cru du premier mot… Être l’oracle lui était tourné en habitude… Il entendait prononcer en maître qui ne rend raison à personne et régner directement de plain-pied. » Et cet esprit « à faire peur, » qui avait effrayé Bossuet, était d’autant plus redoutable qu’il ne se laissait point voir d’abord et, suivant la fine observation du chancelier d’Aguesseau, « paraissait même céder dans le temps qu’il entraînait. »

Toute sa conduite pédagogique à l’égard du duc de Bourgogne est profondément empreinte de ce besoin de domination, et là est la faiblesse de son œuvre. C’est par la pratique de la direction qu’il était arrivé à la connaissance supérieure des principes de la pédagogie ; de la pratique de la direction il lui était resté le goût passionné de l’action envahissante et absolue. À l’époque où Mme de la Maisonfort hésitait à se consacrer à la maison de Saint-Cyr, il lui écrivait : « La vocation ne