Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/309

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d’activité intellectuelle, sont les caractères communs de ces deux règnes. Même les Judéens du dehors, répandus dans tout l’empire romain, bénéficièrent des dispositions bienveillantes de Claude pour Agrippa : ils purent vivre en paix, sans être inquiétés dans l’exercice de leur culte, sans abandonner aucune de leurs habitudes, sans rien perdre de leur cachet distinctif.

Les Judéens d’Égypte et surtout ceux d’Alexandrie, qui avaient tant souffert sous Caligula, se trouvaient particulièrement heureux. Claude avait confirmé expressément leurs droits civiques et ordonné aux gouverneurs de les protéger contre toute vexation. Leur chef, l’arabarque Alexandre Lysimaque, que Claude avait fait sortir de prison, reprit ses fonctions et put rendre des services signalés à ses coreligionnaires. C’est seulement à cette époque que son frère Philon commença à prodiguer les trésors de sa pensée, qui élevèrent à son apogée le développement de l’esprit judéo-grec.

Toutefois, cette période si heureuse fut de courte durée. Si l’empereur Claude avait en Agrippa une confiance absolue, ses serviteurs calomniaient tous ses actes et les interprétaient comme des indices de trahison. L’habileté d’Agrippa, son caractère indépendant et ses tendances nationales paraissaient dangereux pour les intérêts romains. De fait, les Romains ne se trompaient pas. Tout en flattant et cajolant Rome, Agrippa songeait à mettre la Judée en état de soutenir avec elle une lutte qui d’ailleurs lui semblait inévitable.

Il ne voulait pas laisser son peuple à la merci du caprice d’un individu. Aussi fit-il accumuler à Jérusalem des matériaux de construction et entreprit-il de fortifier le faubourg de Bézétha, au nord-est de la ville, en l’entourant de murailles formidables. Ce quartier s’était formé peu à peu par l’accroissement de la population. En cas d’attaque de la ville, le faubourg de Bézétha était le premier menacé, et avec lui la citadelle voisine, la tour Antonia. Agrippa avait donc demandé à Claude la permission d’élever des fortifications alentour. Claude n’avait rien à lui refuser ; quant aux courtisans de l’empereur, on les gagna par des présents. Les constructions achevées, on en fit la dédicace, et les chœurs de lévites chantèrent le psaume XXX, déjà cité.