Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/155

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et de l’amitié, de leur rendre visite, d’accompagner leurs convois funèbres, de consoler leurs affligés et de recevoir leurs enfants dans l’alliance d’Abraham.

Au milieu des occupations multiples que lui imposaient ses fonctions rabbiniques, sa profession de médecin et ses recherches philosophiques et scientifiques, Maïmonide parvint à achever (en 1180) son second grand ouvrage, le Mischné Thora, ou Code religieux, dont l’apparition a fait époque dans l’histoire de la littérature juive. Il y travailla, comme il le dit lui-même, pendant dix ans consécutifs, mais le temps qu’il y consacra n’est, certes, pas en proportion de la grandeur du résultat.

Quand on n’est pas initié aux difficultés de la tâche, on est incapable d’apprécier le mérite de l’admirable ordonnance de cet ouvrage gigantesque, où Maïmonide a réuni et classé avec méthode les mille petits détails épars au hasard dans l’océan talmudique, a purifié le métal précieux de ses scories, rattaché les lois talmudiques aux textes bibliques, ramené les faits particuliers aux principes généraux et composé d’un chaos un tout organique, construit selon les règles de l’art. Le Talmud, avec ses digressions et ses discussions sans fin, est un vrai labyrinthe oit l’on ne peut se diriger qu’à l’aide d’un fil conducteur. Maïmonide en a fait une construction bien ordonnée, avec ses ailes régulièrement distribuées, ses étages, ses appartements et ses chambres, et où le premier venu petit s’orienter facilement sans guide.

Outre ses qualités de forme, le Mischné Thora a, comme fond, une importance très grande. Maïmonide y a fondu en un tout harmonieux les diverses opinions de ses prédécesseurs ; il n’y a manifesté pour aucune doctrine ni dédain, ni préférence. Il a accordé, dans cet ouvrage, une place équitable à la partie philosophique, morale et rituelle du judaïsme, il y a même traité le côté sentimental de la religion juive, c’est-à-dire les espérances messianiques. Son travail est en quelque sorte la résultante de toutes les tendances qui, depuis Saadia, le créateur de la philosophie religieuse, se sont produites dans le judaïsme ; c’est le résumé de trois siècles d’efforts intellectuels.

On peut presque dira que Maïmonide a composé un nouveau Talmud. Il a conservé, il est vrai, les anciens éléments, dont on