Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/262

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juger les affaires criminelles, droit qui leur avait été enlevé ci partie par la reine mère Marie de Molina.

Admirateur d’Ascheri, et, comme lui, d’une piété exagérée, Ibn Wakar appliquait avec une rigueur implacable les châtiments prononcés par le rabbin de Tolède pour toute transgression religieuse. Un jour, dans un mouvement de colère, un Juif de Cordoue ayant blasphémé Dieu en langue arabe, Ibn Wakar, sur le conseil d’Ascheri, condamna le coupable à avoir la langue coupée. Une autre fois, Ibn Wakar, avec l’assentiment d’Ascheri, fit couper le nez, pour la défigurer, à une femme juive qui avait eu des relations avec un chrétien.

Mais si, dans le sud de l’Espagne et en Castille, les Juifs viraient encore dans une sécurité relative, leurs coreligionnaires du nord de l’Espagne et du midi de la France étaient sans cesse exposés aux violences de hordes fanatiques que l’Église avait déchaînées, et dont elle était maintenant impuissante à réprimer les excès. Car il y avait de nouveau des Juifs en France. Neuf ans après leur expulsion de ce pays, ils y avaient été rappelés en 1315 par Louis X, sur les instances de la noblesse et du peuple, qui commençaient à apprécier les services que leur rendaient les Juifs quand ils en étaient privés. Les Juifs n’avaient cependant accepté de rentrer en France que sous condition. Ils exigeaient qu’il leur fût permis de s’établir dans les localités où ils avaient demeuré avant leur bannissement ; qu’on leur rendit leurs synagogues, leurs cimetières et leurs livres, ou qu’on leur concédât des terrains pour y élever de nouveaux temples ; qu’on les garantit contre tout châtiment pour les délits passés, qu’on les autorisait à se faire payer leurs anciennes créances, dont les deux tiers reviendraient au roi, et, enfin, qu’on confirmât leurs anciens privilèges ou qu’on leur en accordât de nouveaux. Le roi Louis accueillit leurs demandes, mais, pour ne pas mécontenter le clergé, il les obligea à se rendre reconnaissables par un signe distinctif.

Deux hauts dignitaires furent chargés de prendre les mesures nécessaires pour la rentrée des Juifs en France. Pour le moment, ou ne leur concédait qu’un permis de séjour de douze ans, avec la promesse que si le roi se décidait à les expulser après ce laps de temps, il les en avertirait une année d’avance. Tous ces arrangements