Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/270

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soutient des discussions avec le mari. Il est vaincu sur le terrain grammatical, mais triomphe en amour.

Dans sa description de l’enfer et du paradis, imitée de l’œuvre de Dante, Immanuel se montre également très fin satiriste. Mais, tandis que le poète chrétien a imprimé à son œuvre une allure grave et solennelle, se posant en juge sévère et faisant châtier dans son enfer pécheurs et criminels, papes et cardinaux, adversaires politiques et ennemis de l’Italie, Immanuel a déployé dans ses descriptions la verve la plus fantaisiste. La Comédie de Dante est divine, celle d’Immanuel humaine. Comme introduction à son voyage à travers le paradis et l’enfer, il raconte qu’un jour où il se sentait pris de remords et disposé à la contrition, il vit en apparition son jeune ami Daniel, que la mort lui avait ravi, et qui s’offrit pour le guider à travers les quartiers des suppliciés de l’enfer et les champs verdoyants des bienheureux. Dans l’enfer, en même temps que les méchants et les mécréants de la Bible, il aperçoit aussi Aristote, puni pour avoir enseigné l’éternité du monde, et Platon, pour avoir affirmé que la conception du genre répond à une réalité. Mais c’est surtout à ses contemporains qu’il s’attaque dans son poème. Il place en enfer les détracteurs de la science, un talmudiste qui a mené secrètement une vie de débauches. des plagiaires et ceux qui réclament tous les honneurs dans la synagogue, exigeant qu’ils puissent se placer tout à côté de l’arche ou officier le jour de l’Expiation. Les empiriques aussi sont précipités par lui en enfer, parce qu’ils spéculent sur la bêtise humaine et font mourir les malades qui ont confiance en leur savoir.

À son entrée dans le paradis, où le conduit son compagnon Daniel, les bienheureux viennent joyeusement à sa rencontre en s’écriant : Voici Immanuel ; c’est le moment de rire ! Il décrit avec beaucoup de sérieux le paradis et ses habitants, mais ne se fait pas faute de faire parfois entendre un petit rire malicieux. Naturellement, tous les saints personnages de la Bible, les patriarches, les pieux monarques et les héros juifs des temps passés se présentent à ses yeux, il aperçoit aussi les poètes Juda Hallévi et Harizi et le philosophe Maïmonide. Mais à côté de David, jouant de la cithare et chantant des psaumes, il voit la courtisane