Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/358

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de Jésus, où il critique les dogmes chrétiens dans un style mordant. Dans l’intérêt de la foi juive et de ses adeptes, il commenta également la satire de Profiat Duran contre le christianisme, et il mit à la portée de ses coreligionnaires l’écrit polémique de Hasdaï Crescas contre le christianisme, en le traduisant de l’espagnol en hébreu.

Parmi les polémistes juifs d’Espagne dont le nom mérite de passer à la postérité, il reste encore à mentionner un contemporain de Joseph ibn Schem Tob, Hayyin ibn Mousa (né vers 1390 et mort vers 1460), qui est resté jusqu’à présent dans l’oubli. Originaire de Bejar, dans la région de Salamanque, il était médecin, écrivain et versificateur. Comme sa réputation de médecin habile lui donnait accès à la cour et auprès des grands d’Espagne, il avait souvent l’occasion de s’entretenir de questions religieuses avec des prélats et des savants laïques. Une conversation qu’il rapporte dans un de ses ouvrages est très caractéristique, parce qu’elle fait connaître le ton qui régnait alors, en Espagne, dans ces controverses, avant que l’Inquisition eût rendu impossible toute libre discussion. Si les Juifs possèdent réellement la vraie religion, comme ils le prétendent, dit un jour un savant ecclésiastique à Hayyim ibn Mousa, pourquoi ne réussissent-ils pas à reconquérir la cité sainte et la Palestine ? — Ils ont perdu ce pays, répliqua Ibn Mousa, parce que leurs aïeux ont péché envers Dieu, et ils ne pourront en reprendre possession qu’après avoir fait sincèrement pénitence. Mais, ajouta-t-il, pourquoi les chrétiens ne possèdent-ils plus le Saint-Sépulcre, ni les autres lieux où se sont passés les divers actes de la Passion, qui se trouvent tous entre les mains des musulmans ? Pourtant, les chrétiens peuvent se confesser et se faire donner à toute heure l’absolution de leurs péchés. Comme l’ecclésiastique tardait un peu à répondre, un chevalier qui avait visité la Palestine et qui assistait à cette conversation, dit : Les musulmans seuls méritent d’être les maîtres de l’emplacement du temple et des lieux saints, parce qu’ils témoignent pour leurs maisons de prières un respect bien plus grand que les chrétiens et les Juifs. Dans les nuits qui précèdent Pâques, les chrétiens tenaient une conduite scandaleuse dans les églises de Jérusalem, y hébergeaient des voleurs et des assassins, s’y battaient