Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/464

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juive à La Canée, dans l’île de Candie (Crète), qui appartenait alors à la république de Venise. Les deux principales familles de cette communauté étaient celle de Delmedigo, comprenant des enfants et des parents du célèbre philosophe Delmedigo, et celle de Capsali, apparentée à l’ancien grand-rabbin de la Turquie.

Elia Capsali (né vers 1490 et mort vers 1555), membre de cette famille, avait des connaissances historiques très étendues. Quand la peste ravagea Candie (en 1523) et mit toute la population en deuil, il écrivit en hébreu l’histoire de la dynastie turque dans un style vif, attrayant, clair et sobre. À l’histoire turque il entremêla les événements de l’histoire juive, décrivant avec une rare vigueur les souffrantes des exilés d’Espagne, telles que les fugitifs eux-mêmes les lui avaient racontées. En composant cet ouvrage, où il recherche avant tout la vérité, Capsali avait pour but de distraire un instant l’attention de la population de Candie des horreurs de la peste. Mais il a réussi à écrire un livre dans un hébreu excellent, parfaitement approprié à ce genre de composition, qui méritait d’avoir et a eu des imitateurs.

Dans les États italiens, surtout, l’affluence des émigrants juifs fut considérable. Car presque tous ceux qui furent expulsés d’Espagne, de Portugal ou d’Allemagne, se rendirent d’abord en Italie pour s’y établir sous la protection de quelque prince tolérant, ou pour se diriger de là vers la Grèce, la Turquie ou la Palestine. De tous les souverains italiens, les papes d’alors se montrèrent certainement les plus bienveillants envers les Juifs. Alexandre VI, Jules II, Léon X, Clément VII, plus préoccupés de l’affermissement de leur pouvoir temporel que des lois restrictives à appliquer aux Juifs, employèrent même, eux et leurs cardinaux, des médecins juifs, au mépris de la décision du concile de Bâle. Il semble qu’à cette époque troublée, où, surtout depuis Alexandre VI, les empoisonnements furent si fréquents à la cour pontificale, on préférât les médecins juifs parce que, de leur part, papes et cardinaux avaient moins à redouter de se voir verser du poison à la place d’une potion. Ainsi, Alexandre VI eut un médecin juif, Bonet de Latès, venu de Provence, qui avait étudié l’astronomie et fabriqua un anneau astronomique, dont il dédia la description latine au pape. Bonet devint plus tard médecin de