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ABACUS - ABADIE
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venter le système décimal de numération avec les neuf chiffres et le zéro, si leur manière d’être et de penser les eût davantage portés aux spéculations arithmétiques. Il ne faut pas pour cela heaucoup de génie et ils auraient pu en revendre aux Latins de la décadence, aux Hindous, aux Arabes et à tous nos abacistes ; ce qu’il fallait, c’était une certaine disposition d’esprit, dépendant d’une certaine conformation cérébrale.

Si les Grecs avaient eu l’idée de réformer leur système de numération, ils n’auraient certainement pas imaginé des signes particuliers pour représenter les neuf premiers nombres. Ils auraient pour cela conservé leurs neuf premières lettres dont l’usage était populaire et les auraient simplement reproduites aux dizaines, au lieu de prendre les lettres suivantes, devenues mutiles par l’intervention du zéro. C’est toujours ainsi que se fait le progrès dans l’intérieur d’une même nation : car il faut nécessairement enter le nouveau sur l’ancien, pour le faire accepter ; l’histoire des novateurs le dit assez : tous ceux qui n’ont pas suivi ce précepte ont été lapidés, pendus ou brûlés, ou au moins torturés, physiquement ou moralement. — Nous avons dit, au commencement de cet article que l’arithmétique portait au moyen âge le nom d’abacus. En dehors du Traité de l’Abacus, de Raoul, évêque de Laon, cité par Chasles, nous devons mentionner le plus célèbre de tous, le Traité a" Arithmétique et d’Algèbre, publié à son retour d’Orient par Léonard de Pise (appelé aussi Fibonacci). C’est l’un des plus anciens qu’on ait vus en Europe et qui a eu la plus grande influence sur le progrès des sciences dans le siècle suivant. Le fond de cet ouvrage, que Fibonacci intitule, d’après les Arabes, Algebra et Almuchabala, a été puisé dans l’Algèbre écrite vers le milieu du ix e siècle par Mouhammad ibn Mousa-al-Khàrizmi, qui lui-même s’était peut-être instruit à l’école des Hindous.

— L’Arithmétique de Léonard de Pise commence par ces mots:Incipit Liber Abaci compositus a Leonardo filio Bonacci Pisano, in anno 1202; Novem figurœ Indorum hœ sunt 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1. Cum his itaque novem ftguris et cum hocsigno Oquod arabice Zephirum appelatur, scribitur quilibet numerus, etc. A. Trasbot.

Bibl. : G. Liuri, Histoire des sciences mathématiques en Italie ; Paris, 1838, in-12. — Chasles, Aperçu historique sur l’origine et le développement des méthodes en géométrie ; Paris, 1875, in-4. — Maximilien Marie, Histoire des sciences mathématiques et physiques; Paris, 1883, in-12. — Daremberg et Saglio, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, article Abacus.

ABAD (Rois maures de Séville) (V. Abbad).

ABADDON ou APOLYON le Destructeur. « Elles avaient pour roi Vange de l’abîme, appelé en hébreu Abaddon et en grec Apolyon. » Apocalypse, ix, 11. Les êtres sur lesquels règne l’ange de l’abîme sont des sauterelles d’enfer, étranges et formidables:à visage d’homme, à chevelure de femme, armées des dents du lion et de la queue du scorpion, couronnées d’or et cuirassées de fer. Il leur a été ordonné de tourmenter pendant cinq mois les hommes qui ne portent point sur le front le sceau de Dieu. Dans le temps où les exorcistes et les théologiens cultivaient la démonologie, les plus experts plaçaient Abaddon au premier rang de la hiérarchie infernale, et le signalaient comme le plus rebelle à l’exorcisme.

ABADÈS (V. Ababdeh).

ABADIE (Louis), compositeur de romances, mort en 1858. Abadie était un assez frible musicien, cependant il était doué d’une certaine facilité mélodique et d’une sentimentalité douce et aimable. Plusieurs de ses romances sont restées populaires ; citons entre autres la Plainte du Mousse, Ange du Ciel, D’où viens-tu beau nuage, Ce que disent les Roses, et surtout les Feuilles mortes. Abadie voulut imiter le romantisme de Monpou, mais, dans ce genre, ses romances comme Ma Senora, le Réprouvé, l’Archer du Roi, le Corsaire, le Sereno, etc., sont loin d’égaler telles de fauteur de Y Andalouse. Une chanson comique d’Abadie, la Fille a Jérôme, est restée populaire. En 1867, on a joué aux Folies-Saint-Cermain une opérette de lui, intitulée les Danseurs de corde. ABADIE (Paul), architecte, né à Bordeaux le 22 juillet 1783, mort dans la même ville le 3 décembre 1868.

— A Bordeaux, il fut élève de Bonfin, dont le nom est attaché à beaucoup des grands travaux exécutés dans cette ville pendant la seconde moitié du xvnr 9 siècle, et, à Paris, de Percier, auprès duquel il resta cinq ans, de 1806 à 1811. Nommé architecte du département de la Charente, en 1818, il construisit à Angoulême le palais de justice, l’hôtel de la préfecture, les abattoirs, la prison, le nouveau portail de l’église Saint-André, la petite église gothique attenant au séminaire. Il a été nommé correspondant de l’Académie des b.-arts le 15 décembre 1832, en remplacement du sculpteur Rauch, et chevalier de la Légion d’honneur le 20 février 1836.

ABADIE (Paul), fils du précédent, architecte, né à Paris le 10 novembre 1812, mort le 2 août 1884 à Chatou (Seine-et-Oise). — Elève d’Achille Leclère et de l’Ecole des b.-arts (1832-1839) ; inspecteur surnuméraire aux travaux commencés à l’hôtel des Archives (1840) ; deuxième inspecteur à la restauration de Notre-Dame de Paris entreprise par Lassus et Viollet-Ie-Duc (1845) ; architecte diocésain d’Angoulême, de Périgueux et de la Rochelle en 1848, Abadie était bien préparé pour donner des soins aux églises endommagées de ces diocèses. Il en restaura successivement un grand nombre, apportant à tous ces travaux les ressources d’un goût sûr et ingénieux, mais substituant peut-être au delà du nécessaire le neuf à l’ancien. — Toutefois, Abadie n’eut pas seulement d’anciens édifices à consolider ou à rajeunir; il en construisit de la base au sommet : les églises des Barris à Périgueux, deMussidan, de Faux, de Bergerac (Dordogne) ; de Bassens, de Langoiran, de Valeyzac, de Bégadan (Gironde) ; de Saint-Ferdinand, de Sainte-Marie de la Bastide à Bordeaux ; de Saint-Martial, de Saint-Ausone à Angoulême. Sur ses dessins, sous sa direction, on a également agrandi les bâtiments du lycée d’Angoulême, et élevé la chapelle de cet établissement ; puis l’hôtel de ville et les abattoirs de Jarnac, les sacristies de la cathédrale de Bordeaux, le collège de Bergerac. De 1862 à 1869, il refit en entier, le reprenant jusque dans ses fondations, le clocher de Saint-Michel de Bordeaux. Quand il élaborait les projets de cet important travail, Abadie terminait la construction de l’hôtel de ville d’Angoulême. Tout en s’inspirant avec ferveur du style et des formes du xm e siècle, l’artiste sut donner à cette œuvre un air moderne. L’observateur habitué à discerner les vrais caractères de l’époque choisie ne s’y trompe pas assurément ; cependant il reste en même temps pleinement satisfait parce qu’il reconnaît d’un coup d’œil comment sont conciliées avec tact les leçons du passé et ce qu’on est tenu d’accorder aux exigences de la vie actuelle.

— Abadie prit part au concours ouvert en 1874 pour l’érection sur la butte Montmartre de l’église du Sacré-Cœur. Au jugement, son projet de style romano-byzantin, fortement inspiré de Saint-Front de Périgueux, qu’il avait restauré, fut classé le premier. Le congrès des architectes, réuni au mois de juin 1884, a visité cet immense chantier dont il a beaucoup loué l’organisation particulièrement intelligente.

La plupart des travaux de restauration ont été exécutés pour la commission des monuments historiques. Pour cette commission, Ahadic a fait aussi des études dont quelques-unes ont figuré à l’Exposition universelle de 1878. Abadie avait exposé en 1855 plusieurs projets de restauration exécutés depuis. Nous avons dit qu’il avait été nommé en 1848 architecte diocésain de la Rochelle, d’Angoulême et de Périgueux. Depuis il fut successivement architecte de la cathédrale de Bordeaux (1862), architecte des bâtiments civils pour l’institution des Jeunes Aveugles, à Paris (1866), membre delà commission des monuments historiques (1871), inspecteur général des