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Une Grande Date

C’est « le grand abord de la plupart des Sauvages de ces quartiers », nous disent les « Relations », « et le passage presque ordinaire de tous ceux qui descendent aux habitations françaises ».

Le 14 juin 1671 tout est prêt pour la manifestation projetée. Les circonstances ont merveilleusement servi les Français. Deux fois, depuis quelques mois, des phénomènes célestes ont paru intervenir en leur faveur. Le 21 janvier, le 21 mars, le météore a été vu à la baie des Puants, à l’Île Manitouline, à Michilimakinac et a vivement frappé l’imagination des sauvages. Un réfléchissement du soleil dans les nuages a fait paraître, tantôt les uns aux côtés des autres, tantôt distants d’une demi-lieue, plusieurs orbes lumineux. À Sainte-Marie-du-Sault, le spectacle s’est fait encore plus grandiose : huit soleils ont paru juxtaposés. Mais quoi donc ! Le météore n’est-il pas l’annonce manifeste du grand événement qui se prépare ? De toute évidence, c’est le symbole de l’alliance prochaine qui s’écrit dans le firmament. Et il nous semble, dirons-nous après Benjamin Sulte, entendre Perrot, avec son adresse coutumière, exploitant ce phénomène auprès des Indigènes.

Voici donc le jour arrivé de la grande cérémonie. Dès le matin on gravit une élévation qui domine la bourgade de Sainte-Marie-du-Sault. Autour du représentant de la France, les délégués de quatorze nations indiennes étalent la variété de leurs costumes. Il y a là des représentants des nations du nord, du sud, et de l’ouest, de celles qui viennent du pays des glaces, et de celles qui viennent des prairies inconnues et non loin des bords de la mer Vermeille. Les Pères de la Compagnie de Jésus sont présents, ainsi que les Français de passage au poste. La scène est digne d’un grand