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PASSAGE DE L’HOMME

simple chose, et c’est celle-ci : Dieu nous ordonne de communier. Cette chose-là est indiscutable. Quant aux joies qui s’en viennent sur nous !… Dieu, mon ami, peut faire que vous trouviez autant de joie dans le morceau de pain bénit que dans la communion elle-même… »

Il parut hésiter un peu, et comme s’attendrir en même temps :

« Et si je vous disais, mon enfant, que je ne sais pas la joie dont vous parlez… La grâce, Dieu ne la donne qu’à quelques-uns, et le démon est bien puissant !… Pour moi, la joie dont vous parlez n’est pas toujours un signe de Dieu… La vérité, ce n’est pas la joie qui la mesure, mais notre obéissance, à nous, notre humilité devant Dieu… C’est ici la première vertu. »

Je n’avais jamais entendu notre Curé parler ainsi. Sa sagesse nous impressionna, on redevenait ce qu’on était, il fallait se méfier de soi… Dieu était grand, on était tout petit. Quant à la joie, à ces élans qui nous faisaient, Claire et moi, courir dans l’herbe et pousser de grands cris, quant à la joie, il fallait s’en méfier : cela venait d’où ? de quels pays jamais bien sus ? et pour vous emmener vers où ?… Oui, la joie était difficile, mieux valait vivre avec patience. Et la vraie joie serait pour