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MARIE-DIDACE

ne manquait jamais de leur en signaler la région. Une heure après, les fils s’en allaient braconner dans la direction opposée.

— Tu leur diras de ma part, à tes gros messieurs de Montréal, que Pierre-Côme Provençal, le garde-chasse du Chenal du Moine, respecte la loi. Il vend pas de canards sauvages en temps défendu, ni pour or, ni pour argent.

Son cou déjà gros s’enfla d’orgueil, comme si la chair trop riche voulait déverser. Il était plus qu’un homme. Il était la loi même, inflexible, inexorable. Une statue.

« Que je le dégraisserais donc à mon goût, ce gros bouffi-là !, pensa Didace. Puis avec un couteau croche ! »

Du dos de la main, il fit reluire sur les écus le profil à double menton d’Édouard VII et remit son portefeuille en poche. Quel dommage, ce bel argent perdu pour la paroisse !

Il allait déboucher sur la grand’route quand un cri de Pierre-Côme le fit retourner.

— Quoi donc ?

Pierre-Côme attendit que Didace fût tout près :

— As-tu dit tantôt que t’avais affaire à mon garçon ? Parce qu’Odilon est là, à ras la grange, si tu veux y parler…