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CHRONIQUE

nique amour, et fort aimée aussi par les Leudes qui voyaient sa bonté.

La trente-neuvième année de son règne[1], Clotaire associa à son royaume son fils Dagobert, et l’établit roi sur les Austrasiens, gardant pour lui ce qui s’étendait vers la Neustrie et la Bourgogne, au-delà des Ardennes et des Vosges.

La quarantième année du règne de Clotaire, un certain homme, nommé Samon, de la nation des Francs, s’associa plusieurs hommes du Sundgau qui faisaient le négoce avec lui, et se rendit chez les Esclavons, surnommés les Wénèdes, pour y commercer. Les Esclavons avaient déjà commencé à se soulever contre les Avares, surnommés les Huns, et contre leur roi Gagan[2]. Les Wénèdes, surnommés Bifulci, étaient depuis long-temps alliés des Huns : lorsque les Huns attaquaient quelque nation, ils se tenaient rangés en bataille devant leur camp, et les Wénèdes combattaient : s’ils remportaient la victoire, alors les Huns s’avancaient pour piller ; si les Wénèdes étaient vaincus, les Huns venaient à leur secours. Ils appelaient les Wénèdes Bifulces, parce qu’ils combattaient deux fois, attaquant toujours avant les Huns. Les Huns venaient tous les ans passer l’hiver chez les Esclavons ; ils prenaient pour leur lit les femmes et les filles des Esclavons, qui leur payaient des tributs, outre bien d’autres oppressions. Les fils des Huns qu’ils avaient eus des femmes et des filles esclavonnes, ne pouvant à la fin supporter cette honte et ce joug,

  1. En 622.
  2. Gagan n’est pas un nom propre, le roi des Avares s’appelait le Chagan ; de là la méprise de Frédégaire.