Nous n’avons plus les grandes prairies où il y avait des haltes pour reprendre haleine, dans la bataille. Des troncs sans têtes, le sang coulait comme coule le vin des cruches inclinées ; il creusait la neige de taches rouges et réchauffait nos figures qu’avait froidies le vent du nord ; le vautour s’enivrait comme un fiancé, les collines aboyaient, la terre tremblait. Nous n’avons plus les navires à plaques d’or, les longs navires bleus dont la proue coupait les monts de glaces, quand nous cherchions, sur l’Océan, les Génies cachés qui bramaient dans les tempêtes. Nous n’avons plus les patins pointus avec lesquels nous faisions le tour des pôles, en portant au bout des bras le firmament entier qui tournait avec nous.
Merci, Ormuzd ! merci ! grâces à toi, roi des Purs !
Enfin, les douze mille ans sont accomplis ; c’est donc le jour, le grand jour ! le commencement !
Toujours là, toi, bon Ferver immortel qui veillais sur moi et laissais tomber dans mon intelligence les rayons merveilleux de tes pupilles d’émeraude. Tu vas grandir, n’est-ce pas ? tu vas déployer ton vol ; tu vas t’étendre dans la lumière et nous allons nous baigner ensemble dans les profondeurs du Verbe.
Comment ?… il reste en place ?… cependant…
Non, je n’entends pas tomber la pluie d’eau noire. Je ne vois pas, au bout de l’horizon, se dresser le pont par où doivent passer les âmes. Les corps ranimés ne se relèvent point de leurs tombeaux.