Page:Gustave Flaubert - Trois contes.djvu/183

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Le caractère des Juifs semblait hideux à Vitellius. Leur dieu pouvait bien être Moloch, dont il avait rencontré des autels sur la route ; et les sacrifices d’enfants lui revinrent à l’esprit, avec l’histoire de l’homme qu’ils engraissaient mystérieusement. Son cœur de Latin était soulevé de dégoût par leur intolérance, leur rage iconoclaste, leur achoppement de brute. Le Proconsul voulait partir. Aulus s’y refusa.

La robe abaissée jusqu’aux hanches, il gisait derrière un monceau de victuailles, trop repu pour en prendre, mais s’obstinant à ne point les quitter.

L’exaltation du peuple grandit. Ils s’abandonnèrent à des projets d’indépendance. On rappelait la gloire d’Israël. Tous les conquérants avaient été châtiés : Antigone, Crassus, Varus…

— Misérables ! dit le Proconsul.

Car il entendait le syriaque ; son interprète ne servait qu’à lui donner du loisir pour répondre. Antipas, bien vite, tira la médaille de l’Empereur, et, l’observant avec tremblement, il la présentait du côté de l’image.

Les panneaux de la tribune d’or se déployèrent tout à coup ; et à la splendeur des cierges, entre ses esclaves et des festons d’anémone, Hérodias apparut, — coiffée d’une mitre assyrienne qu’une mentonnière attachait à son front ; ses cheveux en