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d’explications. Il a le tort de tous les romanciers dits naturalistes, il veut trop dire et trop décrire. Il faut pourtant bien laisser quelque chose à faire à l’imagination du lecteur.


La Patrie, 8 mai 1877 (G. de Saint-Valry).

Réalisme idéal… voilà deux mots dont la réunion a l’air d’une dispute. Rien cependant ne peut mieux rendre, à mon gré, l’impression que laisse le récent volume de M. Flaubert, cette admirable combinaison d’exactitude et de poésie, cette compréhension étonnante du vrai extérieur jointe à une pénétration exquise du sens intime et idéal des choses.

Je ne suis pas tenté, on le voit, d’atténuer le plaisir que m’a procuré la lecture de ce petit volume de deux cent cinquante pages. Parmi les productions de l’imagination contemporaine, vouées pour la plupart à un prochain et légitime oubli, celle-ci survivra sur le rayon de choix ou sont rangés Salammbô, Madame Bovary, même La Tentation de Saint Antoine.

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Mais je ne cherche pas seulement à faire valoir l’unité et la rectitude de cette vie littéraire, je voudrais faire voir aussi comment, dans ce dernier volume, le plus, bref de tous ceux que M. Flaubert a jusqu’ici donnés au public, les idées, le talent, les procédés artistiques de l’écrivain se sont en quelque sorte condensés et résumés dans une synthèse finale.

Supposez que par une série de cataclysmes, qui semblent désormais impossibles avec la diffusion illimitée des écrits modernes, l’œuvre de Flaubert disparaisse tout entière, comme il est advenu de celle de quelques écrivains de l’antiquité, et qu’il ne surnage de lui dans l’histoire littéraire des siècles à venir que son nom, quelques fragments d’articles de Sainte-Beuve et ce petit volume, ces Trois Contes. Ces trois cent cinquante pages suffiraient aux critiques futurs pour se former une idée exacte de la portion perdue.

On y saisirait à merveille la méthode de ce réalisme idéal, ce don de rendre en quelques traits non seulement la réalité exté-