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introduction.

a d’ailleurs été prêchée, dans une certaine mesure, par tous les réformateurs religieux, depuis Çakia-Mouni et Jésus jusqu’à Luther et Calvin, car ils ont tous soutenu le libre examen et n’ont retenu de la tradition que ce qu’ils ne pouvaient pas ne pas admettre, dans l’état d’impuissance où était alors la critique religieuse. Le catholicisme, par exemple, a été fondé en partie par Jésus, mais aussi en partie malgré Jésus ; l’anglicanisme intolérant a été fonde en partie par Luther, mais aussi en partie malgré Luther. L’homme sans religion peut donc donner toute son admiration et sa sympathie aux grands fondateurs de religions, non seulement en tant que penseurs, métaphysiciens, moralistes et philanthropes, mais aussi en tant que réformateurs des croyances établies, ennemis plus ou moins avoués de l’autorité religieuse, ennemis de toute affirmation qui serait celle d’un corps sacré, non d’un individu. Toute religion positive a pour caractère essentiel de se transmettre d’une génération à l’autre en vertu de l’autorité qui s’attache aux traditions domestiques ou nationales : son mode de transmission est ainsi tout différent de celui de la science et de l’art. Les religions nouvelles ont elles-mêmes besoin de se présenter le plus souvent comme de simples réformes, comme un retour à la rigueur des enseignements et des préceptes antiques, pour ne choquer qu’à demi le grand principe d’autorité ; mais, malgré ces déguisements, toute religion nouvelle lui a porté atteinte : le retour à l’autorité prétendue primitive était une marche réelle vers la liberté finale. Il existe donc au sein de toute grande