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la religion et l’irréligion chez la femme.

mis en avant, c’est sa crédulité, qui se prête si facilement à la foi religieuse. — La femme est plus crédule que l’homme, entendons-nous : elle a une certaine confiance dans l’autre sexe, plus fort et plus expérimenté ; elle ajoutera foi volontiers à ce que lui affirment des hommes graves qu’elle est habituée à vénérer, comme les prêtres. Sa crédulité est faite ainsi en grande partie de ce besoin naturel qu’elle a de s’appuyer sur l’homme. Supposez une religion construite et servie uniquement par des femmes, elle serait regardée avec beaucoup plus de défiance par le même sexe. Le jour où les hommes ne croiront pas, la crédulité de la femme même, surtout de la femme médiocre habituée à juger par les yeux et l’intelligence d’autrui, sera bien compromise. Je demandais à une domestique qui était restée trente ans dans la même maison quelles étaient ses croyances : — celles de mon maître, répondit-elle ; — son maître était athée. On posait la même interrogation à la femme d’un membre de l’Institut ; elle répondit : — j’étais catholique en me mariant, j’ai bientôt pu apprécier la supériorité d’esprit de mon mari et j’ai vu qu’il ne croyait pas à la religion, j’ai cessé moi-même entièrement d’y croire.

Un troisième trait du caractère féminin, c’est son esprit conservateur, qui se repose dans la tradition et est moins propre à l’initiative. Le respect du pouvoir et de l’autorité, dit Spencer, prédomine chez la femme, influençant ses idées et ses sentiments à l’égard de toutes les institutions. « Cela tend à fortifier les gouvernements politiques et ecclésiastiques. » Pour la même raison, la foi à tout ce qui se présente entouré d’un appareil imposant est particulièrement grande chez les femmes. « Le doute, la critique, la mise en question de ce qui est établi sont rares chez elles. » — Il est certain que la femme a un esprit plus conservateur que l’homme, soit en religion, soit en politique : on l’a constaté en Angleterre, où les femmes votent pour les questions municipales. C’est, selon nous, que le rôle de la femme ici-bas est précisément de conserver : d’abord, une fois jeune fille, se garder elle-même comme un trésor, être toujours en défiance contre je ne sais quoi qu’elle ne définit pas bien ; puis, une fois femme, garder l’enfant, la maison, le mari ; toujours conserver, retenir, défendre, toujours refermer ses bras sur quelque chose ou sur quelqu’un. Faut-il s’en plaindre ? N’est-ce pas à cet instinct que nous devons de vivre, et si la différence des sexes ou des