Page:Guyau - La Genèse de l’idée de temps.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
LES ILLUSIONS DU TEMPS

sion nouvelle vient de ce que nous avons rêvé des choses analogues[1]. »

Dernier problème. Notre représentation du temps demeure-t-elle discrète, ou devient-elle tout à fait continue ? — Kant nous gratifie du premier coup de la notion du temps continu et même infini, qu’il appelle une « quantité infinie donnée ». C’est trop de générosité. L’esprit, dans sa représentation du temps comme dans toutes les autres et notamment dans celle de l’espace, va d’abord par bonds, sautant à cloche-pied sur les intermédiaires, qu’il n’aperçoit pas. Ce sont des fragments de temps comme des fragments d’espace, avec des interruptions apparentes, des lacunes. C’est seulement à la fin, par la répétition des expériences, que ces lacunes vont diminuant et parviennent à un point d’évanouissement, conséquemment de fusion entre les divers morceaux de durée perçue. On a comparé ce phénomène à ce qui se passe dans la roue de Savart, lorsque les battements d’abord séparés finissent par se rejoindre avec la vitesse croissante de la roue et donnent ainsi

  1. Ibid.