Page:Guyon - Histoire d’un annexé (souvenirs de 1870-1871).djvu/49

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il lut le billet que lui remit le dragon et me dit en français :

« Avez-vous quelques papiers qui puissent vous faire connaître ! »

Je lui présentai mon sauf-conduit.

Il regarda sur une petite carte qu’il avait dans sa poche et chercha du doigt le village de Daspich.

« Daspich ! dit-il, ce pays n’est pas encore occupé. On n’a pas pu vous délivrer un tel sauf-conduit.

— À Nancy, on croyait que les environs de Thionville étaient déjà en votre possession. J’ai reçu ce sauf-conduit au palais du gouverneur. Voici d’ailleurs le certificat d’identité donné par le maire de Nancy et plusieurs papiers qui vous prouveront la vérité ! »

L’officier lut tout avec attention et causa quelque temps à voix basse avec ses voisins.

« Comment se fait-il que vous soyez venu vous jeter dans les avant-postes prussiens ! Votre route était d’éviter Metz et de faire au moins un détour pour arriver chez vous.

— Je me suis trompé : je demandais quelques renseignements sur mon chemin à la barrière, en bas de la côte, quand vos soldats m’ont arrêté. Je voulais m’éloigner, mais ils m’ont conduit de poste en poste.

— Bien. Nous verrons tout à l’heure ce que nous avons à décider. »

Il commanda à deux soldats de me garder à quelques pas, pendant qu’on visitait soigneusement mon sac de voyage.

Rien de suspect ne s’y trouvant, je fus rappelé devant l’officier, qui m’ordonna de me déshabiller, et chacun de mes vêtements fut retourné avec minutie.

Enfin cette visite terminée :

« Ne vous étonnez pas, me dit l’officier, si nous avons procédé à une recherche si sévère. À tout moment, on nous amène des espions bien pourvus de papiers et de certificats. Pour vous, rien ne prouve