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MARIA CHAPDELAINE

les ans c’étaient des familles et des familles qui vendaient leur terre presque pour rien et qui partaient du Canada. Il y en a qui ont gagné gros d’argent, c’est certain, surtout les familles où il y avait beaucoup de filles ; mais à cette heure les choses ont changé et on n’en voit plus tant qui s’en vont.

— Alors vous allez vendre la terre ?

— Ouais. On en a parlé avec trois Français qui sont arrivés à Mistook le mois dernier ; je pense que ça va se faire.

— Et y a-t-il bien des Canadiens là où vous êtes ? Parle-t-on français ?

— Là où j’étais en premier, dans l’État du Maine, il y avait plus de Canadiens que d’Américains ou d’Irlandais ; tout le monde parlait français ; mais à la place où je reste maintenant, qui est dans l’État de Massachusetts, il y en a moins. Quelques familles tout de même ; on va veiller le soir…

— Samuel a pensé à aller dans l’Ouest, un temps, dit la mère Chapdelaine, mais je n’aurais jamais voulu. Au milieu de monde qui ne parle que l’anglais, j’aurais été malheureuse tout mon règne. Je lui ai toujours dit : « Samuel, c’est encore parmi les Canadiens que les Canadiens sont le mieux. »

Lorsque les Canadiens français parlent d’eux-mêmes, ils disent toujours « Canadiens », sans plus ; et toutes les autres races qui ont der-