Page:Haag - Le Livre d’un inconnu, 1879.djvu/41

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Humble nid de pêcheurs tapi dans un rocher
Dont souvent la bourrasque empêche d’approcher.
Tout était mort, désert, les maisons semblaient vides ;
À des cordes pendaient quelques linges sordides,
Vareuses en lambeaux que la bise arrachait.
Et le soleil en cet instant-là se couchait,
Et son disque de sang, au bout de la ruelle,
Plongeait dans une mer noirâtre, âpre et cruelle.
Je descendis toujours, jusque sur les galets
Où les pêcheurs, le soir, étendent leurs filets,
Et là, malgré le vent qui me donnait l’onglée,
Aspirant de varechs gluants l’odeur salée,
Je restai très longtemps pour contempler encor
Les flots, comme des haillons gris dans un décor,
S’agitant sur le ciel qui devenait plus pâle
Et prenait au couchant des tons d’ambre et d’opale.
Et j’étais plein du charme dur de ce tableau,
Tandis que, demi-nus et les jambes dans l’eau,
Devant moi, tout entiers à leur pénible ouvrage,
Deux hommes échouaient leur barque sur la plage.