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introduction à l’histoire

uns de leurs émules d’Allemagne ou d’ailleurs. Les problèmes qu’ils ont agités sont parmi les plus délicats qui se posent à l’esprit de l’historien : celui de la sélection à opérer entre les faits, celui de leur interprétation, celui de leur liaison, celui de leurs rapports avec le présent, etc. Mais si ce sont là des problèmes fondamentaux aux yeux de l’historien, la façon de les poser et de les traiter est, dans les œuvres des penseurs que nous venons de citer, si abstraite et elle s’enveloppe de telles obscurités qu’un interprète n’est pas de trop pour en pénétrer le mystère. Un guide, heureusement, s’offre à nous en la personne de M. Raymond Aron, dont l’Essai sur la théorie de l’histoire dans l’Allemagne contemporaine[1] constitue une précieuse introduction à l’étude des philosophes allemands les plus représentatifs à ses yeux de cette école moderne de « théoriciens de l’histoire »[2].

Il faut bien dire toutefois que, pas plus que la majorité de ses modèles, M. Aron n’est historien ni particulièrement curieux, semble-t-il, des problèmes de méthode. Il s’en tient à la question préalable de la possibilité théorique d’une histoire dégagée de tout subjectivisme et prend d’ailleurs à ce sujet personnellement position dans un autre volume qu’il intitule Introduction à la philosophie de l’histoire. Essai sur les limites de l’objectivité historique[3].

L’intérêt de telles recherches, quand elles sont menées avec la vigueur d’esprit dont témoignent les livres d’un Rickert ou d’un Simmel est évident. Il est toutefois permis de regretter pareil manque de contact avec la pratique de l’historien. Les réflexions de philosophes de cette trempe nous instruiraient davantage si elles tenaient plus largement compte des enseigne-

  1. Paris, 1938, in-8o. Le livre porte le sous-titre : La philosophie critique de l’histoire.
  2. En dehors de l’Essai de R. Aron, on trouvera un exposé très poussé de l’histoire de la pensée philosophique appliquée à la science historique dans l’ouvrage considérable d’Ernst Troeltsch, Der Historismus und seine Probleme (Tübingen, 1922, in-8o). Une place y est faite aux vues des penseurs étrangers à l’Allemagne, et notamment à celles de Benedetto Croce, dont nous avons précédemment (p. 69) cité la Teoria e storia della storiografia (Bari, 1915, in-8o), Un aperçu plus sommaire figure dans l’Einführung de W. Bauer, citée p. 81.
  3. Paris, 1938, in-8o.