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LA BOMBE

et les autres me guideront vers celui que je cherche.

Voilà comment je suis devenu anarchiste.

Dès le lendemain, je me mettais à l’œuvre. Quelques propos subversifs, tenus en présence de mes collègues ou de mes subalternes, furent bien vite rapportés aux grands chefs : on me cuisina. Des brochures trouvées chez moi, des absences injustifiées, des alibis que je donnais maladroitement et dont l’inexactitude était découverte sans peine, m’eurent bientôt compromis davantage. On me révoqua. À mon gré, c’était trop peu, comme vous pensez. Je fis tapage de protestations, avec des phrases sur la liberté de conscience, des menaces de révélations sur les menées de la police, un terrible discours lancé du haut de la scène, dans l’entracte d’un café-concert : on m’arrêta. Bravo !

J’avouai tout. Mais ce policier inconnu, en compagnie duquel on m’avait vu le jour de l’attentat, n’était-ce pas le coupable ? N’étais-je pas le complice ?… Là, je niai avec véhé-