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ments publics aux femmes. Chaque aptitude pourra, au sein de nos assemblées, se produire et se développer. Les trois modes de manifestation de la vie individuelle et sociale, par leur libre spontanéité, élèveront la femme à la hauteur virtuelle de sa mission, et celle là nous sera surtout chère qui, dans sa supériorité, saura se dévouer, tête, bras et ceur, à la cause du progrès.

Cependant, la Voix des femmes se vendant peu, on la mit en actions ; mais, dit le malin chroniqueur de la Physionomie de la presse, un seul socialiste mordit à l’hameçon. Cet homme candide n’était autre que le citoyen Olinde Rodrigues, l’ex-banquier saint-simonien. Il fallut enfin se résoudre à suspendre la publication du journal. Mme Niboyet s’en consola en ouvrant le Club des femmes, de ridicule mémoire.


La République des femmes, journal des cotillons. No 1, juin, in-fol.

Après de longues discussions et d’orageux débats, le club des femmes a prononcé : il faut exterminer ces gueux de maris ! La croisade est ouverte, les légions sont prêtes, les cohortes vésuviennes n’attendent plus qu’un chef pour les conduire, qu’un Tyrtée pour les animer au combat. Ce Tyrtée, ce sera la République des femmes, journal des cotillons. Aux armes ! s’écrie t-il,

Vésuviennes, marchons, et du joug qui nous pèse
 Hardiment affranchissons-nous !
Faisons ce qu’on n’osa faire en quatre-vingt-treize,
Par un décret tout neuf supprimons nos époux !
 Qu’une vengeance sans pareille
 Soit la leçon du genre humain.
 Frappons : que les coqs de la veille
 Soient les chapons du lendemain !

Voici le dernier couplet du Chant du départ de ces dames, ou Grande expédition contre ces gueux de maris :

Quand le tour sera fait, de ce sexe barbare
 Quand plus rien ne restera,
Pour les ensevelir je veux que l’on prépare
Un monument où l’on lira :
 — « Vous qui passez, priez pour l’âme
 « Du sexe fort mis à néant.
 « Le sexe fort battait sa femme ;
 « Mais le battu devient battant, »

 En avant ! Délivrons le terre
 De tyrans trop longtemps debout !
 À la barbe faisons la guerre,
 Coupons la barbe, coupons tout !


— La Politique des femmes, journal publié pour les intérêts des femmes et par une société d’ouvrières. Gérante : Désirée Gay, déléguée de la société d’éducation mutuelle des femmes. Collaboratrices : Jeaune Deroin, Marie Dalmay, Augustine Génoux, H. Sénéchal, directrice aux ateliers nationaux. 18 juin-5 août, 2 nos in-fol.

« Notre politique a été toute de ruse et de dissimulation dans le passé ; faisons qu’à l’avenir elle soit toute de conciliation et de franchise. Cela dépend un peu de nous et beaucoup des hommes.

« Un peu de nous, parce qu’il faut être forte pour être vraie, et que nous ne serons fortes qu’en étant unies entre nous.

« Beaucoup des hommes, parce qu’il faut qu’ils apprennent à respecter notre liberté d’opinion et de croyance, qu’ils nous combattent avec loyauté et courtoisie, et non point par la raillerie et l’insulte.

« Notre but politique est le même que le leur ; mais notre point de vue est différent. Nous devons avoir chacun notre originalité. Sous le vaste étendard du socialisme, la politique des femmes peut marcher de front avec la politique des hommes.

« Nous sommes des ouvrières pauvres, et nous n’attendons d’appui que des hommes de cœur et des femmes qui nous seraient sympathiques.

La politique des femmes, c’est le communisme. Cette doctrine est développée dans un dialogue de femmes et d’ouvrières, parmi les quelles se trouve une dame, une socialiste, une icarienne, et un chœur de voix, selon la forme antique.

Aux plaintes des femmes, la dame répond :

« Où voulez-vous en venir avec ces plaintes ? Les bourgeoises ont les mêmes soucis que vous ; il faut bien qu’elles se résignent. Croyez-vous qu’il y ait des riches à présent ? Ils sont tous ruinés.

« Le chœur. Les gueux !… ils cachent leur argent… ils veulent nous réduire à la misère !… Nous saurons bien leur faire rendre gorge ! »


La Politique des femmes a reparu le 21 août, sous le titre de


L’Opinion des femmes, Liberté, égalité, fraternité, pour tous et pour toutes. Publication de la société d’éducation mutuelle des femmes. Rédacteur en chef : Jeanne Deroin, avec les mêmes collaboratrices. 24 août, 2 nos in-fol.

Qu’est ce que l’opinion des femmes ?

« C’est le jugement qu’une moitié de l’humanité a le droit de porter sur les lois qui lui sont imposées par l’autre moitié.

L’opinion des femmes a été jusqu’à présent comptée pour bien peu, si même elle a été comptée pour quelque chose ; on se persuade qu’elles ne peuvent avoir une opinion raisonnée dans toutes les questions religieuses, politiques et sociales… Ramener tous les hommes vers un même but, l’intérêt général, c’est le seul moyen de concilier tous les intérêts en lutte, et de faire naître dans les cours des sentiments de bienveillance mutuelle ; l’on atteindra ce but lorsque l’opinion des femmes aura l’influence qui lui est due, et viendra, comme un rayon de lumière et d’amour, vivifier l’intelligence de l’homme…

« Nous demanderons constamment, au nom de l’égalité, l’abolition complète de tous