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que les théâtres, qui ne se rouvrent que le lendemain de la Quasimodo. Cependant l’Opéra, non plus que les comédiens français et italiens, n’ayant point voulu profiter de cette prolongation, finirent à l’ordinaire, la veille du dimanche de la Passion. On sait que la pièce que représentent les comédiens français ce dernier jour est Polyeucte, tragédie sainte de Corneille. Elle fait ordinairement tout son effet à cette représentation, et par les beautés qui lui sont propres, et par la perfection du jeu, les acteurs se surpassant, à cause de l’émulation que leur donne l’affluence du monde. Les loges sont retenues plus de deux mois auparavant, et tout est plein à trois heures. Cet empressement vient encore de la curiosité d’entendre le remerciement que les comédiens font ce jour-là, le dernier de l’année théâtrale. Anciennement, c’était toujours le même comédien qui le faisait et qui annonçait : on l’appelait, dans la troupe, l’orateur. Cela n’est plus, ils font l’un et l’autre tour à tour. Ce compliment contient en substance des expressions de reconnaissance, de la part des comédiens, de l’honneur que le public leur a fait pendant le cours de l’année, de très-humbles excuses de ne l’avoir pas contenté autant qu’ils l’auraient souhaité, et des protestations de faire de nouveaux efforts à l’avenir pour mériter la continuation de son assiduité.




Quelque simple que soit un fait, sa nouveauté le rend remarquable. Il arriva vers la fin de janvier (1717) un vaisseau marchand portant pavillon et flammes, et monté de huit pièces de canon. Il venait du Havre et était chargé de morue. C’était un heu, sorte de bâtiment hollandais, qui tire peu d’eau, ce qui lui avait donné la facilité de venir jusqu’à Paris. Il salua de tout son canon le pavillon des Tuileries, et vint mouiller au port Saint-Nicolas, devant le Louvre. Tant qu’il y a resté, le peuple n’a cessé de s’y’arrêter, et l’on assure que l’équipage a gagné plus de cent écus à le laisser voir en dedans, quoiqu’il prît seulement un sou par personne. Il est venu deux mois après un pareil bâtiment ; on ne l’a pas regardé.